Jona after Gerhard Richter, by Bora Mici |
Encadrés
j’arbore mon sourire
la dent blanche et régulière
les yeux amicaux affables
figés
sur ton regard
de l’autre côté
des neurones miroirs
qui me mirent
attentivement
en attendant
que je fasse signe
il y a un p’tit écart
qui se multiplie
au miroir
entre mon sourire et le tien
visiblement à l’écran
sinon dissimulé
derrière un cache-visage
bien serré
qui nous oblige à sourire des yeux
plein de défiance
au creux
de nos existences
parallèles
méridionnelles
sans bornes
encadrées
ceux qui ont vécu
la pandémie
COVID-19
se sont repliés sur eux
on dirait une vie
entière
encadrés
ça a été
assez particulier
et dur
pour les immigrés
qui ont vu disparaitre
leurs liens réels
au profit
de liens virtuels.
maman, papa, soeur et frère
à l’autre bout
du monde
il s’avère
que nous sommes séparés
par les airs
qui avant
nous réunissaient
encadrés
la planète
pourtant
elle a soufflé
juste le moment
de respirer
un coup
avant d’être à nouveau
assaillie
par le monde
industrialisé
en réveil
bouleversé
par mille et un trajets
à travers les eaux
à travers les tuyaux
à travers les airs
à travers les terres
le numérique
n’a jamais été aussi
omniprésent
répandu
on a tissé
on s’est connectés
on a tracé
des lignes
entre l’espace et les souterrains
pour vivre à la surface
et sur les écrans
le sol tempéré nous accueille
il nous fournit
la terre ferme
qui assure
que nous sommes bien en vie
enracinés
encadrés
ce serait dommage
de s’envoler
le rêve du métaverse
le pouvoir d’abréger
la distance entre le ciel et la terre
quelle se veut bien
la façon de faire taire
la pollution sonore
lumineuse et atmosphérique
et rentrer à l’état idyllique
du monde connecté
à vélo et à pied
encadré
dans lequel chacun
s’engage
pour conserver
le patrimoine
de l’univers vécu
à l’échelle humaine.
la pandémie
a créé de nouvelles familles
a brouillé les relations
au sein des générations
nous a indiqué
réencadré
un train de vie
moins rapide et moins avide
d’énergie.
tâchons maintenant
de le maintenir
à songer à l’avenir
des communautés
reliées
en transports en commun
à vélo et à pied
encadrés
par la liberté
non quadrillée
mais raisonnée
le virus nous a mis en garde
contre nous-mêmes
et nos semblables
l’esprit critique qu’il nous inspire
on doit l’appliquer
pour qu’on puisse demeurer
libres de faire nos propres choix
tout en nous rappelant
que si un de nous déchoit
c’est la cata
pour nous tous
on n’a jamais été
aussi reliés
encadrés